La plaidoirie ou l'art de convaincre

Nous vous parlions de la pièce « Plaidoiries » dans la seconde édition du JurisTop. L’équipe de JurisCulture s’est rendue au Théatre Antoine afin de vous en donner un aperçu.

A de très rares exceptions, le procès de Klaus Barbie en est une (1), les grands procès ne sont jamais enregistrés. Les plus grandes plaidoiries sont donc bien souvent perdues, les mots prononcés ne survivant que grâce à la plume des journalistes.

Incarnant les grandes figures du barreau, Richard Berry fait revivre avec brio ces procès qui révèlent des faits de société majeurs ayant marqué l’histoire judiciaire de ces quarante dernières années.

À Bobigny, Gisèle Halimi défend l’avortement. Elle dénonce une loi obsolète qui empêche les femmes de disposer librement de leur corps.

En 1976, c’est à la peine de mort que Paul Lombard s’attaque, en voulant éviter la peine capitale à Christian Ranucci.

En 2006, l’acte infanticide de Véronique Courjault et la plaidoirie d’Henri Leclerc lèvent le tabou du déni de grossesse.

À Bordeaux, le procès de Maurice Papon, défendu par Michel Zaoui revisite les heures sombres de l’histoire de France.

Enfin, Jean-Pierre Mignard interpelle sur l’abandon des banlieues en défendant les familles des deux adolescents morts électrocutés à Clichy-sous-Bois.

Nous ne nous étendrons pas sur le contenu de chaque plaidoirie afin de laisser le plaisir à chacun, de découvrir ces grands moments d’éloquence.

Il m'était cependant impossible de ne pas m'attarder quelques instants sur la plaidoirie de Paul Lombard qui m’a particulièrement touché.

Le 9 mars 1976 à Aix-en-Provence s’ouvre le procès de s’ouvre le procès Christian Ranucci, 22 ans, accusé de l’enlèvement et le meurtre de Marie-Dolores Rambla, âgée de huit ans en 1974.

Durant un procès qui n’aura duré que deux jours, Ranucci se défend mal, est "froid comme la glace" alors qu’à l’extérieur du palais de justice retentissent les cris de haine de la foule. Le 10 mars la sentence tombe. La mort pour le jeune homme, malgré les doutes et les pistes inexplorées.

Convaincu de l’innocence de son client, Paul Lombard n’a pas réussi à le sauver. Il a, en vain, tenter d'expliquer l'attitude de son client lors du procès. Mais avec sa fameuse phrase "l’opinion publique est une prostituée qui ne doit pas rentrer dans les prétoires", il a contribué à ce que l’on en arrive à l’abolition de la peine de mort trois ans plus tard.

"Acquittez Christian Ranucci ! Le sang se lave avec les larmes, non avec le sang. Tant que la peine de mort existera, la nuit régnera dans la Cour d’assises."

Je ne peux que vous conseiller cette pièce. La performance Richard Berry est remarquable et il s’agit probablement de votre dernière chance d’entendre les mots de certains monstres sacrés de l’éloquence.

Clément Truchon-Bartès

(1) Plaidoirie de Jacques Vergès lors du procès de Klaus Barbie

https://www.youtube.com/watch?v=voU62pHZ1dc

https://www.youtube.com/watch?v=4ExW6u9Y0TM